Chant de libération, saisi par nos frères et sœurs des Caraïbes comme thème de notre célébration de cette année pour la Semaine de prière pour l'Unité dans la mémoire de la libération de l’esclavage, de tous les esclavages — ce chant (Exode 15, 1-21 - cf. infra) du peuple libéré du joug de Pharaon est un spiritual. Les esclaves déportés d’Afrique sur les terres d’outre-Atlantique dont les Caribéens, — et cela concerne bien sûr les autochtones de ces terres, — ne s’y sont pas trompés qui ont chanté l’espérance de leur délivrance, puis la joie de leur délivrance à partir de l’Exode — Go down Moses ! Une délivrance de la main des hommes, de l’oppression des hommes, derrière laquelle se dessine une dimension plus profonde, spirituelle, de la captivité, qui est la source de l’oppression physique, dans la chair, depuis celle des esclavages, jusqu'à la captivité de la mort ou de la biologie (cf. Marc 5, 21-43, évangile proposé pour ce temps de prière), pour une véritable résurrection.
« En lui nous as délivrés de l’esclavage du péché et de la mort » reprend une de nos liturgies de la sainte Cène.
Ce chant du peuple libéré est un chant de délivrance, une joie immense, dont les chrétiens ont lu dès le Nouveau Testament l’expression de la délivrance opérée par le Christ de la passion et de la résurrection, Pâque spirituelle.
En cela, le christianisme, dès ses origines, s’inscrit dans la tradition des relectures juives de l’Exode : « si l’Exode n’a eu lieu qu’au temps de Moïse et n’a pas lieu aujourd’hui dans nos vies, à quoi bon ? »
Considérons à présent le verset précis choisi dans ce texte de l’Exode par nos frères et sœurs caribéens : « Ta droite, Seigneur, éclatante de puissance ». Les commentaires juifs lisent ici le mot « droite », la main droite, en rappelant que la main droite représente l’amour de Dieu, là où la gauche représente sa justice. Autrement dit l’acte de libération qui entraîne la ruine des projets du Pharaon, et donc la destruction de son armée qui poursuit le peuple en voie d’être libéré, sont à rattacher non pas à une colère justicière, mais à un zèle d’amour.
C’est pourquoi, selon la tradition juive, ce chant de triomphe de la sortie d’Égypte a aussi un côté mal venu ; au point que sous un certain angle Dieu le déplore : mes créatures viennent d’être englouties et vous chantez !
La source de la libération est l’amour de Dieu — « quand les montagnes s’éloigneraient, quand les collines chancelleraient, mon amour ne s’éloignera point de toi, et mon alliance de paix ne chancellera point, dit le Seigneur, qui a compassion de toi » (Ésaïe 54, 10).
Cet acte de compassion de Dieu, la libération de son peuple opprimé, implique les moyens inévitables, dont cette destruction de l’armée de l’Égypte, mais implique aussi à terme, via le salut d’Israël, celui de l’Égypte — vient le jour où, je cite Ésaïe (19, 25) : « L’Éternel des armées les bénira, en disant : Bénis soient l’Égypte, mon peuple, Et l’Assyrie, œuvre de mes mains, Et Israël, mon héritage ! » En d’autres termes le bien du peuple de Dieu est pour le monde, de même que ce bien qu’est l’unité, et l’unité de l’Église, est pour le bien monde. L’unité pour laquelle nous prions, en effet, selon le sens du mot œcuménique — oikouméné signifiant la terre habitée —, n’est pas pour nous, comme une fin en soi, mais pour le monde.
Autrement dit, il s’agit, lorsque Dieu fait éclater la puissance de sa main droite, la main de son amour, de ne pas recevoir cela dans un esprit inverse à celui de Dieu. L’amour qui éclate là, doit animer nos chants de joie, mais n’être pas un chant de vengeance.
Il ne s’agit en aucun cas pour Dieu de condamner l’Égypte. Il ne joint pas sa voix à celle de ceux qui condamnent : « Quand un méchant persécute un juste, dit le Talmud, Dieu est du côté du juste contre le méchant ; quand un méchant persécute un méchant, Dieu est du côté du méchant persécuté contre le méchant persécuteur ; quand un juste persécute un méchant, Dieu est du côté du méchant persécuté contre le juste persécuteur ».
Ici Dieu devient défenseur. Le persécuté quel qu’il soit, peut trouver un défenseur éclatant en Dieu : « Ta droite, Seigneur, éclatante de puissance », pour quiconque est persécuté, opprimé, captif, fût-ce de son propre péché, et se confie en Dieu pour en recevoir la libération.
C’est au point que, toujours selon le Talmud, « Si tout le monde est trop vite d'accord pour condamner un prévenu, alors mieux vaut le libérer, car tout jugement unanime est suspect ». Dieu prend le parti des opprimés, des persécutés, des dénigrés, seul contre tous, contre les plus imposantes puissances, comme ici l’Égypte de Pharaon, Dieu par sa « droite, éclatante de puissance », intervient. Face à tout ce qui humilie, nous opprime, nous rend captif Dieu agit et libère. C’est encore le signe que nous donne la Pâque du Christ : crucifié par une humanité unanime contre lui, le Christ est en train d’opérer la libération de tous, y compris de ses ennemis, libération qui éclate dans sa résurrection. « Ta droite, Seigneur, éclatante de puissance » !
Exode 15, 1-21
« En lui nous as délivrés de l’esclavage du péché et de la mort » reprend une de nos liturgies de la sainte Cène.
Ce chant du peuple libéré est un chant de délivrance, une joie immense, dont les chrétiens ont lu dès le Nouveau Testament l’expression de la délivrance opérée par le Christ de la passion et de la résurrection, Pâque spirituelle.
En cela, le christianisme, dès ses origines, s’inscrit dans la tradition des relectures juives de l’Exode : « si l’Exode n’a eu lieu qu’au temps de Moïse et n’a pas lieu aujourd’hui dans nos vies, à quoi bon ? »
Considérons à présent le verset précis choisi dans ce texte de l’Exode par nos frères et sœurs caribéens : « Ta droite, Seigneur, éclatante de puissance ». Les commentaires juifs lisent ici le mot « droite », la main droite, en rappelant que la main droite représente l’amour de Dieu, là où la gauche représente sa justice. Autrement dit l’acte de libération qui entraîne la ruine des projets du Pharaon, et donc la destruction de son armée qui poursuit le peuple en voie d’être libéré, sont à rattacher non pas à une colère justicière, mais à un zèle d’amour.
C’est pourquoi, selon la tradition juive, ce chant de triomphe de la sortie d’Égypte a aussi un côté mal venu ; au point que sous un certain angle Dieu le déplore : mes créatures viennent d’être englouties et vous chantez !
La source de la libération est l’amour de Dieu — « quand les montagnes s’éloigneraient, quand les collines chancelleraient, mon amour ne s’éloignera point de toi, et mon alliance de paix ne chancellera point, dit le Seigneur, qui a compassion de toi » (Ésaïe 54, 10).
Cet acte de compassion de Dieu, la libération de son peuple opprimé, implique les moyens inévitables, dont cette destruction de l’armée de l’Égypte, mais implique aussi à terme, via le salut d’Israël, celui de l’Égypte — vient le jour où, je cite Ésaïe (19, 25) : « L’Éternel des armées les bénira, en disant : Bénis soient l’Égypte, mon peuple, Et l’Assyrie, œuvre de mes mains, Et Israël, mon héritage ! » En d’autres termes le bien du peuple de Dieu est pour le monde, de même que ce bien qu’est l’unité, et l’unité de l’Église, est pour le bien monde. L’unité pour laquelle nous prions, en effet, selon le sens du mot œcuménique — oikouméné signifiant la terre habitée —, n’est pas pour nous, comme une fin en soi, mais pour le monde.
Autrement dit, il s’agit, lorsque Dieu fait éclater la puissance de sa main droite, la main de son amour, de ne pas recevoir cela dans un esprit inverse à celui de Dieu. L’amour qui éclate là, doit animer nos chants de joie, mais n’être pas un chant de vengeance.
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Il ne s’agit en aucun cas pour Dieu de condamner l’Égypte. Il ne joint pas sa voix à celle de ceux qui condamnent : « Quand un méchant persécute un juste, dit le Talmud, Dieu est du côté du juste contre le méchant ; quand un méchant persécute un méchant, Dieu est du côté du méchant persécuté contre le méchant persécuteur ; quand un juste persécute un méchant, Dieu est du côté du méchant persécuté contre le juste persécuteur ».
Ici Dieu devient défenseur. Le persécuté quel qu’il soit, peut trouver un défenseur éclatant en Dieu : « Ta droite, Seigneur, éclatante de puissance », pour quiconque est persécuté, opprimé, captif, fût-ce de son propre péché, et se confie en Dieu pour en recevoir la libération.
C’est au point que, toujours selon le Talmud, « Si tout le monde est trop vite d'accord pour condamner un prévenu, alors mieux vaut le libérer, car tout jugement unanime est suspect ». Dieu prend le parti des opprimés, des persécutés, des dénigrés, seul contre tous, contre les plus imposantes puissances, comme ici l’Égypte de Pharaon, Dieu par sa « droite, éclatante de puissance », intervient. Face à tout ce qui humilie, nous opprime, nous rend captif Dieu agit et libère. C’est encore le signe que nous donne la Pâque du Christ : crucifié par une humanité unanime contre lui, le Christ est en train d’opérer la libération de tous, y compris de ses ennemis, libération qui éclate dans sa résurrection. « Ta droite, Seigneur, éclatante de puissance » !
RP, Poitiers, Saint-Porchaire, 27/01/18,
Célébration œcuménique - Semaine de l'Unité
Célébration œcuménique - Semaine de l'Unité
Exode 15, 1-21
Alors, avec les fils d’lsraël, Moïse chanta ce cantique au Seigneur. Ils dirent :
« Je veux chanter le Seigneur, il a fait un coup d’éclat. Cheval et cavalier, en mer il les jeta. Ma force et mon chant, c’est le Seigneur. ll a été pour moi le salut. C’est lui mon Dieu, je le louerai ; le Dieu de mon père, je l’exalterai. Le Seigneur est un guerrier. Le Seigneur, c’est son nom.
Chars et forces du Pharaon, à la mer il les lança. La fleur de ses écuyers sombra dans la mer des Joncs. Les abîmes les recouvrent, ils descendirent au gouffre comme une pierre. Ta droite, Seigneur, éclatante de puissance, ta droite, Seigneur, fracasse l’ennemi. Superbe de grandeur, tu abats tes adversaires. Tu brûles d’une fureur qui les dévore comme le chaume. Au souffle de tes narines, les eaux s’amoncelèrent, les flots se dressèrent comme une digue, les abîmes se figèrent au cœur de la mer. L’ennemi se disait : Je poursuis, je rattrape, je partage le butin, ma gorge s’en gave. Je dégaine mon épée, ma main les dépossède ! Tu fis souffler ton vent, la mer les recouvrit. Ils s’engouffrèrent comme du plomb dans les eaux formidables.
Qui est comme toi parmi les dieux, Seigneur ? Qui est comme toi, éclatant de sainteté ? Redoutable en ses exploits ? Opérant des merveilles ? Tu étendis ta droite, la terre les avale.
Tu conduisis par ta fidélité le peuple que tu as revendiqué. Tu le guidas par ta force vers ta sainte demeure. Les peuples ont entendu : ils frémissent. Un frisson a saisi les habitants de Philistie. Alors furent effrayés les chefs d’Edom. Un tremblement saisit les princes de Moab. Tous les habitants de Canaan sont ébranlés. Tombent sur eux la terreur et l’effroi. Sous la grandeur de ton bras ils se taisent, pétrifiés, tant que passe ton peuple, Seigneur, tant que passe le peuple que tu as acquis. Tu les fais entrer et tu les plantes sur la montagne, ton patrimoine. Tu as préparé, Seigneur, un lieu pour y habiter. Tes mains ont fondé, ô Seigneur, un sanctuaire. Le Seigneur règne à tout jamais ! »
Le cheval du Pharaon avait pénétré dans la mer, avec ses chars et ses cavaliers, et le Seigneur avait fait revenir sur eux les eaux de la mer : mais les fils d’Israël, eux, avaient marché à pied sec au milieu de la mer.
La prophétesse Miryam, sœur d’Aaron, prit en main le tambourin : toutes les femmes sortirent à sa suite, dansant et jouant du tambourin. Et Miryam leur entonna : « Chantez le Seigneur, il a fait un coup d’éclat. Cheval et cavalier, en mer il les jeta ! »