<script src="//s1.wordpress.com/wp-content/plugins/snow/snowstorm.js?ver=3" type="text/javascript"></script> Un autre aspect…: “SEIGNEUR, notre Seigneur, ton Nom !…”

lundi 19 décembre 2022

“SEIGNEUR, notre Seigneur, ton Nom !…”





Psaume 8, 2-5
SEIGNEUR, notre Seigneur,
Que ton nom est magnifique par toute la terre !
Mieux que les cieux, elle chante ta splendeur !
Par la bouche des tout-petits et des nourrissons,
tu as fondé une forteresse contre tes adversaires,
pour réduire au silence l’ennemi revanchard.
Quand je vois tes cieux, œuvre de tes doigts,
la lune et les étoiles que tu as fixées,
qu’est donc l’homme pour que tu penses à lui,
l’être humain pour que tu t’en soucies ?
Michée 5, 1
Et toi, Bethléem Ephrata,
trop petite pour compter parmi les clans de Juda,
de toi sortira pour moi celui qui doit gouverner Israël.
Ses origines remontent à l’antiquité, aux jours d’autrefois.

*

Le Nom, quasiment trois fois, d’entrée, avec reprise à la fin de ce Psaume 8 ! Le Tétragramme, énoncé dans le judaïsme comme “mon Seigneur”, puis “notre Seigneur, et “ton Nom”, ce Nom au-dessus de tout nom… (Adonaï, Adoneinou, […] Chemkha) — “SEIGNEUR, notre Seigneur, que ton Nom (est magnifique !…)” — יְהוָה אֲדֹנֵינוּ -- מָה-אַדִּיר שִׁמְךָ

“Quand je vois tes cieux !”, parole émerveillée donnée pour avoir été dite il y a près de trois mille ans — époque où l’on est loin de connaître ce que l’on appelle de nos jours l'univers observable, qui compte quelques 2 000 milliards de galaxies, selon les études les plus récentes (si mes renseignements sont à jour), dont les galaxies dites “de masse significative”, selon le vocabulaire consacré, contiennent chacune quelques centaines de milliards d’étoiles — les nombres avancés n’étant pas limitatifs… L’univers dans son ensemble, dont l'extension réelle n'est pas connue, est susceptible de compter un nombre immensément plus grand de galaxies qu'on ne le pense…

Notre galaxie, la Voie lactée, est une de ces 2 000 milliards de galaxies de l'univers observable… Elle a une extension de l'ordre de 100 000 années-lumière. C’est-à-dire que l’on perçoit les étoiles lointaines de notre seule galaxie comme elles étaient il y a 100 000 ans. Et notre galaxie est donc une seule de ces quelques 2 000 milliards de galaxies de quelques centaines de milliards d'étoiles.

Bref, parmi ces 2 000 milliards de galaxies, dans une de ces galaxies, notre galaxie, qui compte quelques centaines de milliards d’autres étoiles, une de ces étoiles, le soleil, est donc l’étoile de notre système solaire, autour duquel tourne la terre — sur laquelle nous sommes réunis en cet endroit minuscule, temple de Poitiers.

Aux jours donnés pour être ceux du Psaume 8, on partage une vision de l’univers où la terre est un abri au-dessus duquel, soutenu par des colonnes, repose le firmament où apparaissent les étoiles fixes, entre lequel firmament et la terre passent sept planètes qui marquent les sept jours de notre semaine.

Au jour de la reprise de la prophétie de Michée par Matthieu — “Hérode fit appeler secrètement les Mages, se fit préciser par eux l’époque à laquelle l’astre apparaissait, et les envoya à Bethléem” (Matthieu 2, 7-8 ) —, les Mages ont observé une étoile en un temps où la terre est reçue, depuis Aristote (IVe s. av. JC), comme une sphère autour de laquelle tournent les sept planètes, couronnées par le ciel des fixes, le mouvement diurne et la mer de cristal qui garde le ciel empyrée, paradis céleste, et le trône de Dieu.

Ce monde-là, dans lequel la terre est déjà une sphère depuis dix-huit siècles, s’est effondré en 1609, sous le regard de Galilée au bénéfice de la lunette astronomique… Un effondrement qui vaut à Galilée une condamnation en bonne et due forme par Rome : c’est le système d'Aristote, qui fait l'unanimité dans le monde latin depuis le XIIIe s., qui vient d’être radicalement remis en question. Dans son livre Galilée hérétique (1983), l’historien des sciences Pietro Redondi soutient que c’est, du coup, le dogme de l’eucharistie, reposant sur la philosophie d’Aristote distinguant la substance et l’accident, qui est remis en cause ipso facto par les observations de Galilée.

Quoiqu'il en soit, le choc, véritable “effondrement des puissances des cieux” (Luc 21, 26), aura des conséquences considérables.

Radical bouleversement du monde, la philosophie va devoir repenser l’univers. Le premier à poser systématiquement cette refondation est Descartes, qui emprunte la formule par laquelle saint Augustin répondait à ses doutes : “je pense donc je suis” (cogito ergo sum). Mais de facto, au sens où la reprend Descartes, cette formule ancienne date pourtant du XVIIe s. Jamais auparavant elle n’avait servi à fonder le monde, comme c’est le cas depuis Descartes. Le sujet devient le fondement alternatif de l'univers dont la structure vient de s’effondrer sous le regard de Galilée. Dorénavant, le sujet rationnel est au fondement de la lecture du monde, bientôt en vis-à-vis de son expérience de la nature (i.e. l’”empirisme” proposé par l’anglais Francis Bacon — XVIe-XVIIe s.). La synthèse entre le rationalisme de Descartes et l’empirisme trouve, via Newton (Principia, 1687), son point d’orgue au XIXe s., suite aux travaux des philosophes Kant et Hegel (1). En théologie ce tournant philosophique trouve son équivalent entre le cartésien critique Spinoza et la critique du XIXe s. Spinoza donne le premier temps, avec son Traité théologico-politique (XVIIe s.), d’une proposition de relecture de la Bible, relecture post-galiléenne. Sur cette base, apparaît au XIXe s., dans l’héritage de Hegel, le développement d’une critique biblique voyant dans la Bible un processus évolutif débouchant sur le “monothéisme”, mot qui en ce sens précis remonte à ce même XIXe s., à savoir le concept d'un Dieu unique universel (2). Le XXe s. et le XXIe s. s'inscrivent dans cette tradition, donnant la naissance du “monothéisme” (en ce sens récent) entre le Ve s. av. JC (Römer) et le IIe s. av. JC (Barc).

Tournant du XIXe s. donc, et même XXe, l'astronomie ayant été à nouveau bouleversée, avec les travaux d’Einstein, la philosophie relativiste, et la physique quantique. Un nouveau bouleversement du monde a eu lieu, dont on ne mesure sans doute pas encore toutes les conséquences — mais que l’imagination a commencé à saisir, dans la science-fiction, par ex. sous l’angle de l’idée rendue théoriquement possible par la relativité espace-temps, de voyages dans le temps…

Nous voilà, quoiqu’il en soit, près de Noël, avec toujours cette reprise possible de l'émerveillement du Psaume 8, lié non pas à l'astronomie contemporaine, ni au sens moderne du moderne mot monothéisme, mais au Nom, donné comme au-dessus de tout nom, imprononçable, qui au-dessus des cieux et des astres y trouvant leur auteur, voit fonder sa puissance par la bouche des nourrissons, à l’image de l’enfant de Noël auquel rendent hommage les astres avec l’astre des Mages… Paul en dira qu’il a reçu “le Nom qui est au-dessus de tout nom” (Philippiens 2, 9). Écho en Matthieu 11, 25-27 :

“Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, de ce que tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et de ce que tu les as révélées aux enfants.‭
‭Oui, Père, je te loue de ce que tu l’as voulu ainsi.‭
‭Toutes choses m’ont été données par mon Père, et personne ne connaît le Fils, si ce n’est le Père ; personne non plus ne connaît le Père, si ce n’est le Fils et celui à qui le Fils veut le révéler.‭”





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(1) Moment tournant le 14 octobre 1806, bataille d'Iéna, tournant commenté par Hegel.
(2) Comme le cogito cartésien apparaissait avec Augustin (Ve s. ap. JC), le mot “monothéisme” apparaît au XVIIe s. sous la plume du philosophe anglais Henry More, mais il a pour lui un sens très différent, voire opposé au sens reçu depuis le XIXe s. Pour More, il s’agit d’affirmer que le christianisme, étant trinitaire, n’est donc pas monothéiste, mais est universaliste contrairement au judaïsme, “monothéiste”, c’est-à-dire pour lui tenant de ce qu’on appelle aujourd'hui “monolâtrie”. More entendait donner un vis-à-vis au terme “polythéisme”, qui remonte, lui, à haute époque, forgé par Philon d’Alexandrie (Ier s. ap. JC) pour dire la différence entre monde gréco-romain, adorant plusieurs dieux, et monde juif en adorant un seul, monolâtre, donc — ce Dieu des juifs, seul adoré, correspondant pour l’hellénisme à la divinité universelle des philosophes.


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