<script src="//s1.wordpress.com/wp-content/plugins/snow/snowstorm.js?ver=3" type="text/javascript"></script> Un autre aspect…: Pensant à Haïti...

vendredi 29 janvier 2010

Pensant à Haïti...



Eléments de mémoire d'une histoire partagée avec la France...

Vers 1790, Saint-Domingue était devenue la colonie française la plus riche de toute l'Amérique grâce aux profits immenses de l'industrie sucrière et de celle de l’indigo générés par le travail des esclaves. Des dizaines de milliers d'Africains avaient été déportés comme esclaves pour faire fonctionner ces industries. Leur sort était juridiquement encadré par le code noir, mais, dans les faits, ils subissaient des traitements souvent pires encore que ceux du redoutable code.

En 1791, un des soulèvements des esclaves particulièrement efficace entraîne de vifs débats à la nouvelle Assemblée législative de Paris.

Pour en faire appliquer les décisions, de nouveaux commissaires civils, dont Léger-Félicité Sonthonax et Étienne Polverel, sont envoyés à Saint-Domingue, appuyés de quatre mille volontaires de la garde nationale.

Ceux-ci débarquent au Cap le 18 septembre 1792, à la veille de la proclamation de la République française. Sonthonax annonce à son arrivée qu’il entendait préserver l’esclavage. Mais c'est lui qui avait écrit un an plus tôt : « Les terres de Saint-Domingue doivent appartenir aux noirs. Ils les ont acquises à la sueur de leur front » et il ne reçoit que défiance de la part des colons !

De leur côté, l’Angleterre et l’Espagne, qui avaient déclaré la guerre à la France, attaquent Cap-Français, par la mer et par les terres depuis la partie orientale de l'île, possession espagnole. À l'été 1793, de nombreux ports et la plus grande partie du pays étaient occupés.

À la recherche d'alliés, Sonthonax proclame de son propre chef l'abolition de l'esclavage le 29 août 1793 dans le nord de l'île. Un mois plus tard, Polvérel fait de même dans le reste du pays. Afin de faire avaliser cette décision, les commissaires civils choisissent trois députés - Belley, Mills et Dufay - qu'ils envoyent à Paris. Devant le rapport de ces députés, la Convention vote, dans l'enthousiasme, le 4 février 1794, l’abolition de l'esclavage dans toutes les colonies.


Un affranchi, Toussaint Bréda (du nom de la plantation au Haut-du-Cap où il naquit en 1743), dit Toussaint Louverture - devenu aide-de-camp d'un des tenants de la révolte de 1791, Georges Biassou, qui se rallie aux Espagnols de l'Est de l'île en 1793 afin de combattre les colons - remporte plusieurs victoires audacieuses qui lui valent ce surnom de L'Ouverture.

L'abolition de l'esclavage par les commissaires civils le conduit à rallier la République française en mai 1794. En quelques mois, il refoule les Espagnols à la frontière orientale de l'île et bat les troupes de ses anciens chefs qui leur sont restés fidèles. En 1795, il libère l'intérieur des terres. La Convention l'élève au grade de général en juillet. En mars 1796, le gouverneur Laveaux, qu'il a délivré d'une révolte au Cap, le nomme lieutenant-général de Saint-Domingue.

À mesure de ses victoires, Toussaint confirme l'émancipation des esclaves. Grâce aux renforts arrivés de métropole en mai 1796, il reprend la lutte contre les Anglais qui tiennent de nombreux ports. Lassés d'un combat sans espoir, ceux-ci finissent par négocier directement avec lui et abandonnent Saint-Domingue le 31 août 1798.

Après avoir envahi en un mois la partie espagnole de Saint-Domingue (janvier 1801), il établit son autorité sur toute l'île.

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Napoléon Bonaparte, qui signe avec l'Angleterre les préliminaires de la paix d'Amiens le 18 octobre 1801, charge une expédition militaire de plusieurs escadres réunissant au total trente et un mille hommes à bord de quatre-vingt-six vaisseaux, menée par son beau-frère le général Leclerc, de reprendre le contrôle de l'île.

Toussaint arrête une stratégie de défense de marronnage, devant l'arrivée des troupes de Napoléon, en février 1802, pratiquant une guerre d'usure. Mais les troupes napoléoniennes tiennent bientôt toute la côte.

Les généraux de Toussaint Louverture, dont Henri Christophe et Jean-Jacques Dessalines se rendent après d'âpres combats si bien que Toussaint Louverture lui-même accepte sa reddition en mai 1802. Il est autorisé à se retirer sur l'une de ses plantations, à proximité du bourg d'Ennery, dans l'ouest de l'île, non loin de la côte. Le 7 juin 1802 Toussaint Louverture est arrêté malgré sa reddition. Il est déporté en France, il est interné au fort de Joux, dans le Jura, où il mourra des rigueurs du climat et de malnutrition le 7 avril 1803.

Toussaint Louverture
"Quand Toussaint-Louverture vint, ce fut pour prendre à la lettre la déclaration des droits de l’homme, ce fut pour montrer qu’il n’y a pas de race paria ; qu’il n’y a pas de pays marginal ; qu’il n’y a pas de peuple d’exception. Ce fut pour incarner et particulariser un principe ; autant dire pour le vivifier. Le combat de Toussaint-Louverture fut ce combat pour la transformation du droit formel en droit réel, le combat pour la reconnaissance de l’homme et c’est pourquoi il s’inscrit et inscrit la révolte des esclaves noirs de Saint-Domingue dans l’histoire de la civilisation universelle. S’il y a dans le personnage un côté négatif — difficilement évitable d’ailleurs eu égard à la situation — c’est en même temps là qu’il réside : de s’être davantage attaché à déduire l’existence de son peuple d’un universel abstrait qu’à saisir la singularité de son peuple pour la promouvoir à l’universalité." Aimé Césaire, Toussaint Louverture. La Révolution française et le problème colonial, éd. Présence africaine, pp. 344-345.
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Toussaint Louverture neutralisé, Leclerc décide le désarmement de la population et le met en œuvre à grand renfort d'exécutions sommaires ; alors plusieurs se détachent peu à peu de l'Expédition de Saint-Domingue et rejoignent les insurgés, prenant conscience que l'Expédition de Saint-Domingue n'avait d'autre but plus important que celui de rétablir l'esclavage à Saint-Domingue.

C'est en apprenant le rétablissement de l'esclavage à la Guadeloupe qu'Alexandre Pétion donne le signal de la révolte, le 13 octobre 1802. À la tête de cinq cent cinquante hommes il marche contre le principal poste français du Haut-du-Cap, le cerne, le fait désarmer et sauve quatorze canonniers que les siens voulaient égorger : l'armée des « indépendants » est alors formée. Les généraux Geffrard, Clervaux et Christophe, viennent se joindre à Pétion qui accepte de céder au dernier le commandement de l'insurrection.

Dessalines rejoint alors de nouveau les révoltés, dirigés par Pétion, en octobre 1802. Au congrès de l'Arcahaye (15-18 mai 1803), naît le premier drapeau haïtien, bicolore bleu et rouge, inspiré du drapeau français. Le 19 novembre 1803, à la tête de l'armée des indigènes, avec à ses côtés Henri Christophe, il impose à Rochambeau - le cruel successeur de Leclerc (mort de la fièvre jaune en novembre 1802) qui utilisait des chiens féroces achetés à Cuba contre les insurgés, entraînés à chasser et manger les noirs - la capitulation du Cap après la défaite des armées françaises, la veille, à la bataille de Vertières. Rochambeau n'a alors d'autre choix que d'ordonner l'évacuation de l'île.

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Après le départ des Français, Saint-Domingue reçoit son nom indien d'Haïti (Ayiti). Dessalines proclame la République le 1er janvier 1804 aux Gonaïves.

La première république libre d'anciens esclaves vient de naître.

Dix ans plus tard, en 1814, le président Pétion va initier des négociations pour la reconnaissance d'Haïti. Elles durent jusqu'en 1824. Le 11 juillet 1825, le roi de France Charles X promulgue une ordonnance qui reconnaît l'indépendance du pays contre une indemnité de 150 millions de francs-or (la somme sera ramenée en 1838 à 90 millions de francs).




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