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mardi 6 novembre 2018

Bach - Cantate BWV 154 / Luc 2, 41-49





Cantate BWV 154
Mein liebster Jesus ist verloren

1er dimanche après l'Épiphanie Luc 2, 41-49
Première exécution 9 janvier 1724 | Texte : Martin Jahn (Mvt. 3 ) ; Luc 2, 49 (Mvt. 5) ; Christian Keymann (Mvt. 8) ; Anonyme (Mvts. 1, 2, 4, 6, 7) ; traduction Guy Laffaille



1. Mein liebster Jesus ist verloren:
O Wort, das mir Verzweiflung bringt,
O Schwert, das durch die Seele dringt,
O Donnerwort in meinen Ohren.

2. Wo treff ich meinen Jesum an,
Wer zeiget mir die Bahn,
Wo meiner Seele brünstiges Verlangen,
Mein Heiland, hingegangen?
Kein Unglück kann mich so empfindlich
rühren,
Als wenn ich Jesum soll verlieren.

3. Jesu, mein Hort und Erretter,
Jesu, meine Zuversicht,
Jesu, starker Schlangentreter,
Jesu, meines Lebens Licht!
Wie verlanget meinem Herzen,
Jesulein, nach dir mit Schmerzen!
Komm, ach komm, ich warte dein,
Komm, o liebstes Jesulein!

4. Jesu, lass dich finden,
Lass doch meine Sünden
Keine dicke Wolken sein,
Wo du dich zum Schrecken
Willst für mich verstecken,
Stelle dich bald wieder ein!

5. Wisset ihr nicht, dass ich sein muss in dem, das meines Vaters ist?

6. Dies ist die Stimme meines Freundes,
Gott Lob und Dank!
Mein Jesu, mein getreuer Hort,
Läßt durch sein Wort
Sich wieder tröstlich hören;
Ich war vor Schmerzen krank,
Der Jammer wollte mir das Mark
In Beinen fast verzehren;
Nun aber wird mein Glaube wieder stark,
Nun bin ich höchst
erfreut;
Denn ich erblicke meiner Seele Wonne,
Den Heiland, meine Sonne,
Der nach betrübter
Trauernacht
Durch seinen Glanz mein Herze fröhlich macht.
Auf, Seele, mache dich bereit!
Du musst zu ihm
In seines Vaters Haus, hin in den
Tempel ziehn;
Da lässt er sich in seinem Wort erblicken,
Da will er dich im Sakrament erquicken;
Doch, willst du würdiglich sein Fleisch und Blut genießen,
So musst du Jesum auch in Buß und Glauben küssen.

7. Wohl mir, Jesus ist gefunden,
Nun bin ich nicht mehr betrübt.
Der, den meine Seele liebt,
Zeigt sich mir
zur frohen Stunden.
Ich will dich, mein Jesu, nun nimmermehr lassen,
Ich will dich im Glauben beständig
umfassen.

8. Meinen Jesum lass ich nicht,
Geh ihm ewig an der Seiten;
Christus lässt mich für und für
Zu den Lebensbächlein leiten.
Selig, wer mit mir so spricht:
Meinen Jesum lass ich nicht.


Mon très cher Jésus est perdu :
O parole qui m'apporte le désespoir,
O épée qui traverse mon âme,
O parole de tonnerre dans mon oreille.

Où vais-je trouver mon Jésus,
Qui me montre le chemin,
Où l'ardent désir de mon âme,
Mon sauveur, est-il allé ?
Aucun malheur ne peut me frapper plus durement,
Que la perte de Jésus.

Jésus, mon trésor et mon rédempteur,
Jésus, ma confiance,
Jésus, puissant écraseur de serpent,
Jésus, lumière de ma vie !
Comme mon cœur se languit,
Petit Jésus, de toi avec chagrin !
Viens, ah viens, je t'attends,
Viens, ô très cher petit Jésus !

Jésus, laisse-moi te trouver,
Ne laisse pas mes péchés
Être de lourds nuages
Où, pour mon horreur,
Tu serais caché de moi.
Apparais encore à moi !

Ne saviez-vous pas que je me dois aux affaires de mon Père ?

C'est la voix de mon ami,
Louanges et merci à Dieu !
Mon Jésus, mon très cher trésor,
Permet, par sa parole,
Lui-même d'être entendu avec réconfort ;
J'avais des nausées de douleurs,
Mon chagrin aurait presque détruit
La moëlle dans mes os ;
Maintenant, pourtant, ma foi redevient forte,
Maintenant je suis dans le plus grand des bonheurs
Car je ressens la joie de mon âme,
Mon sauveur, mon soleil,
Qui après la nuit troublée par la
tristesse
Par son éclat fait mon cœur
se réjouir.
Debout, mon esprit, sois prêt !
Tu dois aller à lui,
Dans la maison de son Père, dans son
temple ;
Là il est visible dans sa parole,
Là il te rafraîchira dans le sacrement ;
Mais si tu veux profiter dignement sa chair et son sang,
Alors tu dois embrasser Jésus dans le repentir
et la foi

Quel bonheur, Jésus est retrouvé,
Maintenant je ne suis plus troublé.
Lui que mon âme aime
Se montre lui-même à moi à ce moment heureux.
O mon Jésus, je ne te quitterai
plus jamais,
Maintenant je t'embrasse dans la foi durablement.

Je ne laisserai pas Jésus aller,
Je marcherai à côté de lui pour toujours ;
Christ, pour toujours,
Me guidera aux sources de la vie.
Béni soit celui qui dit avec moi :
Je ne laisserai pas aller Jésus.





Méditation sur le texte — Luc 2, 41-49 :
41 Les parents de Jésus allaient chaque année à Jérusalem, à la fête de Pâque.
42 Lorsqu’il fut âgé de douze ans, ils y montèrent, selon la coutume de la fête.
43 Puis, quand les jours furent écoulés, et qu’ils s’en retournèrent, l’enfant Jésus resta à Jérusalem. Son père et sa mère ne s’en aperçurent pas.
44 Croyant qu’il était avec leurs compagnons de voyage, ils firent une journée de chemin, et le cherchèrent parmi leurs parents et leurs connaissances.
45 Mais, ne l’ayant pas trouvé, ils retournèrent à Jérusalem pour le chercher.
46 Au bout de trois jours, ils le trouvèrent dans le temple, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant.
47 Tous ceux qui l’entendaient étaient frappés de son intelligence et de ses réponses.
48 Quand ses parents le virent, ils furent saisis d’étonnement, et sa mère lui dit : Mon enfant, pourquoi as- tu agi de la sorte avec nous ? Voici, ton père et moi, nous te cherchions avec angoisse.
49 Il leur dit : Pourquoi me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous pas qu’il faut que je m’occupe des affaires de mon Père ?

*

C’est le pèlerinage de la Pâque ; le pèlerinage le plus important du judaïsme. En rapport précis avec la mémoire fondatrice de notre présent — de notre aujourd’hui, et dès lors, de nos lendemains. Au-delà du souvenir familial, il y a la dimension communautaire, qui fait que l’on monte à Jérusalem, au Temple. Pour cela, s’il le faut, on marche longtemps sur les routes poussiéreuses — depuis la Galilée, pour Marie et Joseph. On part en groupe, on se découvre en route : c’est l’occasion de sceller des liens aussi. Ainsi, au retour de la fête, on a lié connaissance. Les enfants circulent d’un groupe à l’autre. Le voyage est long. On fait halte, on bivouaque ensemble.

Dans cette joyeuse cohue, Jésus, peuvent se dire ses parents, est quelque part avec ses amis, et comme eux, il est sous telle ou telle tente. Rien que de très normal. Puis on découvre qu’il n’est pas là du tout ! « Perdu » / « verloren » (selon les mots de la Cantate de Bach BWV 154). Pour que toutefois le lecteur ne se trompe pas sur ce qui se passe, Luc précisera que Jésus « était soumis » à ses parents (Luc 2, 51). Mais pourtant, à présent il est mûr, il a l’âge de la responsabilité devant Dieu, autour de laquelle l’histoire du judaïsme place le rite de la bar-mitzvah.

Dans la tradition biblique, dès les temps les plus anciens, les enfants au tournant par lequel ils deviennent jeunes adultes, sont déclarés responsables devant Dieu — responsables de ce qu’ils ont entendu jusque là. Responsable, c’est-à-dire en capacité de répondre ; de répondre à, de répondre de — notamment répondre de la parole reçue.

C’est là ce que le judaïsme appelle « bar-mitzvah », ce qui signifie « enfant du commandement ». Dans notre enfance, nos parents sont responsables de notre relation avec Dieu. Puis nous accédons au temps où nous-mêmes devenons seuls responsables devant lui. C’est le passage à l’âge de la majorité religieuse.

Jésus aussi est passé par là. Ce jour-là, il se situe devant la parole de Dieu en présence des docteurs de la Loi étonnés. « Du ciel, il t’a fait entendre sa voix pour faire ton éducation » dit le Deutéronome (ch. 4, v. 36). Jésus vient de dévoiler qu’il est au cœur de cette relation intime avec Dieu. Ses parents sont montés à Jérusalem pour la Pâque. Tout le début de l’Évangile de Luc les montre observant la Torah. Scènes ordinaires de la vie religieuse. Ici Jésus, atteignant l’âge de la responsabilité religieuse, va exprimer dans tout son sens ce qu’est devenir adulte devant Dieu, unique devant Dieu, par soi-même et non plus par ses parents.

Cela correspond à sa parole : « il faut que je m’occupe des affaires de mon Père » : une leçon pour ses parents, et aussi pour nous-mêmes — et comme parents et comme enfants. Dépouillé, « perdu » / « verloren » en regard des siens, pour être unique devant Dieu, Jésus s’occupe des affaires de son Père. Et c’est ce que Dieu nous demande aussi. Tous devons devenir adultes par rapport à ceux que nous recevons comme modèles. Ainsi dans la Cantate 154 écrite sur ce texte, Bach, dans la tradition luthérienne de la piété, ouvre sur notre rapport, subjectif, avec le texte.

Il s’agit pour nous de vivre dans la lumière, la lumière de la parole de Dieu que l’on a appris à écouter… Comme Jésus. Et pour nous autres, par lui. Jean 8, 12 : « Jésus leur parla de nouveau et dit : Moi, je suis la lumière du monde ; celui qui me suit ne marchera point dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie. »

Comme Jésus et, pour nous, par lui. Puisque comme l’annonçait Jean 1, 9 & 12-13 : Il est « la véritable lumière qui, en venant dans le monde, éclaire tout homme. […] À tous ceux qui l’ont reçue, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom et qui sont nés, non du sang, ni de la volonté de la chair ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu. »

C’est ce qui est être éduqué, « conduit hors de » — hors de la captivité rappelle la Pâque — ; et aussi hors de l’enfance, et de l’enfance spirituelle, pour être devant Dieu. Et en parallèle, comme parents, il s’agit de laisser être eux-mêmes, face au commandement qu’ils ont appris à connaître, ceux que nous tendons à maintenir dans notre dépendance, prolongeant leur enfance ; cela vaut concernant tout ce qui peut devenir une chaîne.

Ici, s’opère comme une nouvelle étape avec ceux avec qui nous sommes liés, nos proches, nos parents — et aussi nos maîtres, et tout ce qu’on peut imaginer — ; s’opère comme une séparation, qui vaut jusqu’à nos biens et nos propres vies. C’est qu’il n’est de vie à l’image du Christ, de vie en vérité, que sous le regard de Dieu. Et cela suppose, tôt ou tard, l’abandon de tout autre regard dont notre vie serait censée dépendre, pas seulement le regard des parents, mais ce que peut conférer un statut social, ou une position dans la société ou dans l’Église. Il s’agit désormais de vivre devant Dieu par la foi seule.

C’est de cela que Jésus montre l’exemple dans ce texte qui nous le présente au Temple à douze ans. Il vit dans sa chair cet exemple-là, et dévoile par la même occasion qui il est : le Fils de Dieu. Il est par nature ce que nous sommes tous appelés à devenir par adoption.

Ici les trois jours de sa disparition revêtent un second sens, annonçant sa résurrection : « proclamé Fils de Dieu par sa résurrection d’entre les morts », selon les mots de Paul.

Comme Jésus nous en donne l’exemple, devenir enfant de Dieu, c’est-à-dire adulte en Christ, requiert la fin, la mort de toute dépendance, y compris du regard d’autrui, dans la famille et hors de la famille, hors de l’Église et dans l’Église. C’est le départ de la libération par l’Évangile.

Alors, un monde nouveau, annonce des nouveaux cieux et de la nouvelle terre, devient possible, un monde de relations humaines reconnaissant l’autre pour lui-même, fût-il son enfant, son père ou sa mère, être créé selon l’image de Dieu, manifestée en Christ et non selon mon image ! Un prochain qui n’est pas limité à nos schémas, mais d’une valeur infinie. Voilà tout un programme, qui n’est pas facultatif : abandonner autrui, à commencer par ses proches, à Dieu. Et, pour cela, nous y abandonner nous-mêmes, en écho à l’autre texte du jour de la Cantate :

Romains 12, 1-6
1 Je vous exhorte donc, frères, par les compassions de Dieu, à offrir vos corps comme un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu, ce qui sera de votre part un culte raisonnable.
2 Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence, afin que vous discerniez quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait.
[…]
Cantique des Cantiques 2, 8
C’est la voix de mon bien-aimé ! Le voici, il vient, Sautant sur les montagnes, Bondissant sur les collines.

RP

(Centre théologique de Poitiers – Pôle Aliénor - 6.11.18 - Roland Poupin & Philippe Devaux : Le cycle du temps liturgique : progression et signification - Formes et genres de la musique religieuse : messe, cantates, Passion, Choral, offices liés à un temps particulier)


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